Rapport OMS/UNICEF 2019

L’ONU publie les nouvelles statistiques mondiales sur l’accès à domicile des populations, à l’eau potable, à l’assainissement et à l’hygiène

Le Joint Monitoring Program OMS/UNICEF a publié le 19 juin 2019 son nouveau rapport « 2000-2017 : focus spécial sur les inégalités ». Ce rapport évalue les progrès accomplis aux niveaux national, régional et mondial pour réduire les inégalités en matière de services d’eau et d’assainissement. Il comprend une analyse des inégalités entre pays et à l’intérieur des pays et identifie les populations les plus à risque d’être laissées de côté, en particulier sur ces 3 objectifs :

  1. mettre fin à la défécation en plein air
  2. réduire les inégalités dans les services d’eau, d’assainissement et d’hygiène de base
  3. réduire les inégalités dans les services d’eau et d’assainissement gérés en toute sécurité

UNE DISPONIBILITE DES DONNES EN PROGRESSION

En 2017, les Nations Unies avaient défini de nouveaux indicateurs permettant de mesurer l’accès à un « service d’eau potable géré en toute sécurité » et l’accès à un « service d’assainissement géré en toute sécurité ». Ces nouveaux indicateurs mondiaux avaient fait l’objet de premières estimations dans le rapport 2017 du JMP. Cependant, ces nouvelles définitions imposaient des progrès importants en matière de reporting. En effet, seuls 96 pays avaient pu faire l’objet d’estimations en ce qui concerne l’eau potable gérée en toute sécurité (35% de la population mondiale) et 84 pays pour ce qui est de la gestion en toute sécurité de l’assainissement (48% de la population mondiale).

Dans le rapport 2019, la solidité des données s’est quelque peu améliorée et l’accès « géré en toute sécurité » a pu être évalué dans :

  • 117 pays qui disposaient d’estimations pour des services d’eau potable gérés en toute sécurité, représentant 38% de la population mondiale.
  • 92 pays qui avaient des estimations pour des services d’assainissement gérés en toute sécurité, représentant 54% de la population mondiale.

La vision mondiale reste cependant encore incomplète : hors Europe, Canada et Etats-Unis, l’indicateur « gestion en toute sécurité » n’a pu être calculé que dans environ 70 pays (27% de la population hors Europe, Canada et Etats-Unis). Etant donné ces lacunes, les estimations mondiales sont encore à considérer avec précaution. En outre, elles pourraient varier significativement au moment où l’Inde et la Chine sauront faire leurs propres estimations.

LES CHIFFRES A RETENIR

Définitions préalables :

  • Définition d’un « service d’eau potable géré en toute sécurité » : eau de boisson provenant d’une source d’eau améliorée (eau courante, puits tubulaire ou forage, puits protégé, source protégée, eau emballée ou livrée) située au domicile, disponible en cas de besoin et exempte de contamination chimique et fécale.
  • Définition d’un « service d’assainissement géré en toute sécurité » : utilisation d’une installation sanitaire améliorée (toilettes à chasse d’eau vers un réseau d’égout ou une fosse septique, latrine améliorée à fosse ventilée, latrine à fosse avec dalle, toilettes à compostage), où les excréments sont éliminés en toute sécurité in situ ou transportés et traités hors site, non partagée avec d’autres ménages et qui dispose d’un dispositif de lavage des mains avec du savon.

Estimations pour l’eau :

  • 2,2 milliards de personnes n’ont pas accès à des services d’eau potable gérés en toute sécurité en 2017. Sur ces 2,2 milliards, 785 millions de personnes ne bénéficient même pas d’un service de base d’approvisionnement en eau potable et 144 millions continuent à boire de l’eau de surface non traitée puisée dans des cours d’eau ou dans des lacs.
  • 8 personnes sur 10 qui n’ont pas accès aux services de base vivent en milieu rural. Près de la moitié d’entre eux vivent dans un PMA (Pays les moins avancés).

Estimations pour l’assainissement :

  • 4,2 milliards de personnes n’ont pas accès à des services d’assainissement gérés en toute sécurité en 2017. Sur ces 4,2 milliards, 2 milliards de personnes ne bénéficient même pas d’installations sanitaires de base. Parmi elles, 627 millions de personnes ont accès à des services limités, 701 millions à des installations non améliorées et 673 millions pratiquent encore la défécation en plein air.
  • 7 personnes sur 10 qui manquent encore de services de base vivent en milieu rural. Un tiers d’entre eux vivent dans un PMA.

Estimations pour l’hygiène : 

  • En 2017, 60 % de la population mondiale a un accès de base à des installations de lavage des mains avec de l’eau et du savon disponible à la maison. 3 milliards de personnes ne se lavent toujours pas les mains à domicile (1,6 milliard de personnes ont un accès limité à du savon et de l’eau, 1,4 milliard n’a aucun accès à l’eau et à du savon).

ET EN FRANCE ?

Dans le rapport JMP 2019, l’erreur d’interprétation des résultats d’une enquête ménages de l’INSEE a pu être corrigée et l’accès à l’eau géré en toute sécurité est remonté à 97,9% en métropole (93,3% dans le JMP 2017). Cela implique qu’à ce jour, 2,1% soit 1,4 million de français métropolitains ne bénéficient pas de cet accès géré en toute sécurité, mais seulement d’accès à des services de base.

L’accès à des installations sanitaires gérées en toute sécurité lui est estimé à 88,4% de la population française métropolitaine, soit 7,5 millions de personnes qui n’y ont pas accès. La cible 6.2 de l’ODD 6 est ainsi loin d’être atteinte sur le territoire métropolitain, sachant que 6 679 023 de personnes n’ont accès qu’à des installations basiques et 877 217 personnes n’ont accès qu’à des services limités (en grande majorité en zones urbaines).

Pour certains territoires d’Outre-Mer, les chiffres sont également inquiétants, notamment pour :

  • Guyane : 4,5% des habitants n’ont pas accès à des services élémentaires d’eau potable (environ 35 000 personnes) et 3,4 % (environ 26 000 personnes) n’ont pas accès à des installations sanitaires améliorées. Plus de 16 000 personnes recueillent leur eau de boisson directement à partir des sources d’eau de surface et environ 4700 personnes pratiquent encore la défécation à l’air libre.
  • Mayotte : 16,3% des habitants n’ont pas accès à des services d’eau potable gérés en toute sécurité (environ 41 000 personnes). Plus de 7000 personnes recueillent leur eau de boisson directement à partir des sources d’eau de surface. Aucun chiffre n’est disponible sur l’accès à l’assainissement. 

ELEMENTS QUALITATIFS  

Qualité de l’eau potable

Selon le rapport, il y a un enjeu important autour du manque de données représentatives sur la qualité de l’eau potable. Lorsque des données existent, elles ne sont souvent pas ventilées par population urbaine / rurale. Alors que 117 pays disposaient de données nationales sur la qualité de l’eau en 2019, 55 seulement disposaient de données pour les zones urbaines et 34 seulement pour les zones rurales. Les données sur la qualité de l’eau proviennent principalement d’organismes de surveillance de la santé publique ou d’organismes de réglementation qui se concentrent sur l’approvisionnement en eau courante dans les zones urbaines. Ils omettent alors souvent les petits systèmes de canalisations et peuvent donc surestimer la sécurité de l’eau.

Abordabilité des services d’eau et d’assainissement

En 2018, le JMP et le programme mondial d’analyse et d’évaluation de l’assainissement et de l’eau potable de UN-Water (GLAAS) ont lancé une initiative conjointe pour examiner les méthodes et les indicateurs permettant de contrôler le caractère abordable des services d’eau et d’assainissement. Des études de cas sont en cours dans six pays (Cambodge, au Ghana, au Mexique, au Pakistan, en Ouganda et en Zambie). Trois facteurs sont considérés : 1. Ce que l’utilisateur paie pour les services d’eau et d’assainissement ; 2. Le pouvoir d’achat de l’utilisateur ; 3. Quels autres biens et services essentiels l’utilisateur paie-t-il et à quel coût.

DES CIBLES ENCORE HORS D’ATTEINTE

Au rythme actuel, l’atteinte en 2030 d’un accès universel à des services d’eau gérés en toute sécurité reste hors de portée, sans une accélération des efforts et un renforcement des politiques et des financements pour le secteur. Si le rythme des 17 dernières années se maintient, il y aura encore 2 milliards d’humains sans accès satisfaisant à l’eau potable en 2030.

Le rapport précise que les gouvernements doivent développer des mécanismes pour identifier et suivre la situation des groupes défavorisés. Ne laisser personne de côté implique un suivi des taux globaux de progrès des services d’eau et d’assainissement mais également un focus particulier sur la réduction des écarts entre les groupes défavorisés et le reste de la population.

POUR ALLER PLUS LOIN

  • Retrouvez le Rapport du Joint Monitoring Program 2019 ici
  • Les données par pays ici
  • Retrouvez le blog de End Water Poverty ici

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